Faire du sport à outrance peut se répercuter sur le physique et le mental du pratiquant. Excès oblige ! Comment passe-ton d’un cercle vertueux à un cercle vicieux ?
Le sport est souvent présenté comme un remède universel. Il améliore la santé, booste le moral et apporte une sensation de bien-être incomparable. Pourtant, lorsqu’il devient une obsession, il peut engendrer des conséquences graves sur le corps et l’esprit. Cette dépendance, connue sous le nom de bigorexie, touche un nombre croissant de gens, notamment dans un contexte où la performance et l’apparence physique occupent une place centrale dans nos sociétés. Derrière les routines d’entraînement excessives se cache une véritable souffrance.
La bigorexie s’installe insidieusement. Ce qui commence comme une simple envie de progresser peut rapidement se transformer en une nécessité absolue, où l’entraînement devient une priorité au détriment du reste. Les personnes touchées ressentent une angoisse intense à l’idée de manquer une séance et multiplient les heures de sport, même en cas de fatigue, de douleurs ou de blessures. Leur emploi du temps tourne presque exclusivement autour des sessions d’exercices.
Les répercussions physiques sont nombreuses. Des études, notamment publiées dans le British Journal of Sports Medicine, montrent que l’absence de récupération favorise l’apparition de blessures chroniques, de fractures de stress et de tendinites. Le corps, constamment sollicité, ne parvient plus à se régénérer correctement, ce qui entraîne une fatigue persistante et un affaiblissement du système immunitaire. Sur le long terme, ce surmenage peut même perturber le métabolisme et provoquer des déséquilibres hormonaux, entraînant des troubles du sommeil, des fluctuations de poids ou une baisse de la libido.
Mais au-delà de l’impact physique, la bigorexie a aussi des conséquences psychologiques profondes. « Il s’agit d’une pathologie, qui ferait penser à la dysmorphophobie de l’anorexie, puisque le corps est toujours perçu comme un peu trop gros, pas assez beau, pas assez musclé ici ou là… » explique Bernard Corbel, Psychologue clinicien.
Elle s’accompagne ici d’une peur irrationnelle de la prise de poids ou d’une insatisfaction chronique vis-à-vis de son apparence. Certains individus développent des comportements alimentaires restrictifs, cherchant à optimiser chaque calorie pour maximiser leurs performances ou sculpter leur silhouette selon des standards idéalisés. « Ils vont ajouter une consommation d’hormones ou d’anabolisants pour davantage de résultats et là on est vraiment dans une pente très risquée… ».
L’un des problèmes majeurs de cette addiction est qu’elle passe souvent inaperçue. Contrairement aux dépendances aux substances, la société valorise l’effort, la discipline et la rigueur sportive. Il est rare qu’un entourage s’inquiète de voir quelqu’un enchaîner les séances de cardio ou de musculation, et les signaux d’alerte sont souvent ignorés, voire encouragés. Pourtant, la bigorexie enferme aussi dans un cycle nocif, où l’équilibre physique et mental est rompu. « Nous sommes carrément face à un trouble de l’identité appuyé sur une faille narcissique, avec un besoin de perfection qui devient destructeur » reprend le professionnel.
Pour éviter de tomber dans ce scenario, il est essentiel d’apprendre à écouter son corps et à respecter ses besoins. L’alternance entre effort et récupération est une règle fondamentale, permettant de se renforcer sans s’épuiser. Il est par ailleurs important de diversifier les activités et d’adopter une approche plus flexible, où l’exercice ne devient pas une obligation mais un plaisir. En cas d’anxiété excessive à l’idée de ralentir, consulter un psychologue du sport peut être salutaire.