Président-Fondateur de la BBA (B-Boy B-Girl Africa), Salif Traoré est un entrepreneur né. A la tête d’un vaste mouvement de Breaking regroupant de nombreux pays africains, ce self made man est en quête d’unité.
Natif du Burkina Faso, Salif Traoré a beaucoup voyagé avant d’atterrir au Sénégal. C’est là qu’il découvre réellement le Breakdance, pratiqué par de nombreux jeunes entre la fin des années 90 et le début 2000. Cette danse a tout pour lui plaire : Une histoire, un style, des chorégraphies très physiques et ce côté fédérateur plein de promesses. Comme les garçons de son âge à l’époque, il assimile la pratique à un beau challenge.
«La première fois j’assistais à un spectacle et en regardant le podium, je me suis dit qu’il fallait absolument que j’arrive à réaliser ces moves. J’ai toujours eu un penchant pour la danse, l’expression corporelle. Petit je voyais mon père et ma mère bouger sur du James Brown, de la salsa, des danses traditionnelles et cela me donnait envie de les imiter». Ce fils d’aviateur, qui se déplace au gré des missions de son père, fréquente différents lycées et marque sa présence en devenant chorégraphe attitré lors d’évènements scolaires.
«Je m’étais essayé au Hip Hop durant un séjour au Togo, mais à Dakar je me suis initié au Breaking et cela a été une révélation ». Ayant débuté avec une compagnie du nom d’Xtreme B-Boys, il remporte de nombreux trophées jusqu’en 2008. Convaincu que la danse est sa vocation, il se professionnalise en intégrant l’école des sables de Germaine Accogny pour un cursus complet (ballet contemporain, traditionnel, pédagogie d’enseignement…). « J’ai développé mon savoir, puis en 2011 je me suis envolé pour la France avec la compagnie bordelaise Révolution ». Intégrer le collectif lui permet d’entamer une tournée africaine par la suite et de rencontrer des danseurs pour son projet BBA. Objectif : réunir des talents continentaux et créer des événements ponctuels.
Marcher comme un seul homme
Motivé par son idée, Salif Traoré a à cœur de promouvoir la nouvelle scène, au Sénégal notamment où les organisateurs culturels pèchent par un certain sectarisme. « Les jeunes avaient besoin de s’identifier, d’être pris en charge. Ils étaient livrés à eux-mêmes sans perspective d’avenir et forcément leur potentiel commençait à décliner. On sentait un découragement chez eux. Il fallait se lever de bonne heure pour pouvoir vivre de la danse, se faire accepter par la société et trouver des financements». Face à une configuration plutôt défavorable, le jeune homme décide d’agir. «Je ne voulais pas que le Breaking disparaisse. L’association B-Boy B-Girl Africa a ainsi vu le jour. J’en étais le Fondateur et je souhaitais donner un sens à ce titre par des initiatives à fort impact sur la jeunesse ».
Dès 2012 le changement est palpable. Salif Traoré duplique son mouvement dans d’autres pays. Son plus fervent désir est de conférer au Breaking africain la place qu’il mérite. « Des formations ont été organisées pour fournir une assise aux intéressés et un cadre dans lequel évoluer. En Afrique nous sommes des entrepreneurs de la survie, nous avons l’habitude du système D et du multitasking. Je suis parti de là pour conseiller les gens et leur montrer comment tirer avantage de leurs atouts».
Encourageant des artistes de la sous région à rallier la BBA, Salif Traoré réussit un joli tour de force. Plus d´une dizaine de nationalités sont représentées dans sa structure. « Ma plus grande fierté est d’avoir rapproché les gens à travers l’Art et de leur avoir permis de monter sur scène à nouveau. Je me suis aussi improvisé vidéaste parce qu´à un moment le digital a pris le dessus. J’étais le seul africain à réaliser du contenu et à le partager de manière virale ».
Conscient de sa responsabilité, Salif Traoré met un point d’honneur à ne pas décevoir ceux qui lui ont fait confiance. « BBA doit faire évoluer les choses, on ne peut pas se permettre d’agir n’importe comment. J’aimerais que l’on travaille main dans la main. Le nord, le sud, l’est, l’ouest. Nous sommes tous africains et devons contribuer à l’essor de notre continent, sans distinction d’aucune sorte». Convié au Maroc pour la Finale du Championnat Hip Hop et Breakdance les 26 et 27 mars dernier, le jeune activiste culturel a eu le plaisir de côtoyer des danseurs nationaux et de juger de leur niveau.
Ce fut également l’occasion d’évoquer les possibles partenariats avec la FRSMAFH. « J’ai été agréablement surpris par ce que j’ai vu ici. Les jeunes sont débordants d’énergie et d’originalité lorsqu’ils sont en train de performer et je salue le travail de la Fédération depuis plus de 26 ans pour tirer les danses urbaines vers le haut. Elle m’a ouvert les yeux sur de nouvelles perspectives. Nous avons tellement à faire ensemble. Attendez-vous à un beau partenariat mêlant nos expertises respectives et notre amour de la danse ». Tout est dit !